7, 8 et 9 Mai 1945 : késako ?

8 Mai 1945. Dans la nuit, un peu avant minuit, se réunissent à Karlshorst, banlieue berlinoise, des représentants militaires des Alliés, de l’URSS et de l’Allemagne. Pour cette dernière, c’est le Generalfeldmarschall Keitel, commandant en chef de la Wehrmacht, qui a fait le déplacement. On l’invite, un peu sous la contrainte, à signer l’acte de capitulation du 3e Reich. Moment historique, dont la date est désormais synonyme de commémoration ou de jour férié en Occident.
Et pourtant … la guerre en Europe a officiellement pris fin le 7 Mai. Quant à la Russie, et de nombreux autres pays de l’ancien bloc de l’Est, le « Jour de la Victoire » est célébré le … 9 Mai.
7, 8 et 9 Mai 1945 : qu’est ce que sont finalement ces trois dates ? Voyons cela ensemble.

Tout commence le 30 Avril. Hitler est réfugié dans son bunker à Berlin, en cours d’invasion par les Soviétiques. Cette fois, il en a marre : la guerre est perdue, tout ça à cause des généraux qui n’ont pas réussi à appliquer ses plans pourtant géniaux (selon lui), une bonne partie de ses proches se disputent déjà le pouvoir. Il décide donc de mettre un point final à cette histoire, et une balle dans sa tête. Il se suicide avec sa femme, Eva Braun (rappelons qu’ils sont jeunes mariés : ils se sont épousés la veille – le film « La chute » aurait pu s’appeler « 1 mariage puis 1 enterrement »).
Mais comme il ne veut pas que ce gros naze de Göring, ou ce petit fourbe d’Himmler en profitent pour prendre la place vacante, il rédige auparavant son testament politique, où il nomme notamment celui qui doit être son successeur à la tête de ce qu’il reste de l’état allemand. Ce sera le grand amiral Karl Dönitz, chef de la Kriegsmarine depuis 1943, qui n’en demandait pas tant. C’est en réalité l’un des rares responsables que Hitler considérait comme étant toujours à peu près compétent et fidèle. Il forme alors le gouvernement de Flensbourg, qui doit gérer ce qu’il reste du Reich.

Et justement, qu’en reste t il, de l’Allemagne Nazie ? Pas grand chose : seul entre un tiers et un quart du pays est toujours sous contrôle. La capitale elle même est encerclée, et largement occupée par l’armée rouge. Dans les territoires occupés : tient encore la Norvège (relativement épargnée), le Danemark (plus pour longtemps), la moitié de l’Autriche et de la Tchécoslovaquie (Prague est sur le point de se révolter). Quant à ses alliés, c’est également fini : la Hongrie est battue, et ce sera bientôt le tour de la République sociale italienne (dans le Nord de l’Italie actuelle) – Mussolini est mort le 28 Avril, fusillé par des partisans. L’armée est en déroute, les forces aériennes n’ont presque plus de pilotes (ils n’ont plus de carburant non plus de toute façon), les villes en ruines, il n’y a que la marine qui tient, et encore … En guise de Reich millénaire, Dönitz reçoit un beau paquet d’emmerdes. Il n’y a désormais plus aucun espoir, et il le sait.

Le grand amiral Karl Dönitz


Revient alors une vieille idée : celle de la paix séparée. L’idée est que Anglais et Américains n’aiment pas beaucoup les rouges, alors après tout : pourquoi ne pas s’allier contre eux, afin d’aller taper du bolchévique ? Vieille idée, car celle ci date tout de même de 1941 : un certain Rudolf Hess, compagnon de longue date de Hitler, décide tout seul d’aller au Royaume Uni, après avoir volé un chasseur, pour négocier la paix. Autant le préciser : ça ne marchera pas, et cet « incident » a été mis sur le compte de la santé mentale de Hess. Le principal obstacle à cette paix séparée, c’était Hitler lui même : il était persuadé de pouvoir vaincre sur les deux fronts, ou du moins pouvoir pousser les Occidentaux à négocier dans une position qui lui serait favorable. La suite, on la connait.
Il n’empêche : cette idée de pouvoir s’entendre avec les Alliés, pour ensuite aller gaiement tous ensemble taper du communiste persistera tout le conflit, et parmi les plus hautes instances du pays. C’était notamment l’un des objectifs des responsables de la tentative de coup d’état de Juillet 1944 : écarter Hitler et les SS, pouvoir négocier à l’Ouest et mieux taper à l’Est. Dönitz, lui, s’y est toujours refusé, mais principalement car Hitler y était opposé. Maintenant que le Führer est mort, il ne peut plus vraiment s’opposer à quoi que ce soit.

Le nouveau patron de l’Allemagne contacte les Alliés, pour voir si y’a moyen de moyenner. Ce qu’il ne sait pas, c’est que le sort du pays a déjà été décidé, et depuis longtemps : Britanniques, Américains et Soviétiques se sont en effet mis d’accord pour une capitulation totale, sans conditions (rappelez vous, j’en ai parlé dans un article précédent). Il comprend rapidement que c’est peine perdue. Il change alors d’objectif : tout doit être fait pour que le maximum de troupes puissent se rendre à l’Ouest, plutôt qu’aux soviétiques. En effet, si les Alliés respectent plutôt bien les conventions relatives aux prisonniers, l’on redoute que les peuples de l’Est (qui ont souffert bien plus de l’occupation allemande, rappelons le), ne se montrent moins cléments : exécution des prisonniers ou déportation en Sibérie (ce qui sera effectivement le sort de beaucoup d’entre eux).


Pendant une bonne semaine, il transfère autant de soldats et de civils que possible sur le front de l’Ouest, n’assurant qu’une défense minimale face aux offensives de l’armée rouge. Ce qu’il reste de la marine évacue tout ce qu’elle peut, et Dönitz envoie même un pilote de la Luftwaffe tenter de négocier un accord partiel avec les Américains : en gros, laissez la chasse allemande tranquille, afin qu’on se défende des Russkofs, et on ne vous attaquera pas. Eisenhower répondra laconiquement « no », et ce car il avait un certain savoir vivre (et insulter des mamans, c’est pas bien). Malgré quelques déconvenues, cela fonctionne tant et si bien que les Soviétiques ne feront qu’un tiers des prisonniers de ce qui reste de l’armée allemande (alors que pourtant, durant le conflit, ils ont affronté la plus grosse partie de celle ci).

Malgré tout, la situation devient intenable, et Dönitz doit se rendre à l’évidence (et tout court également). Il envoie Alfred Jödl, chef des opérations à l’OKW (Oberkommando des Wehrmacht, le haut commandement de l’armée allemande), soit le n°2 des instances militaires. Celui ci se rend … à Reims, où se trouve à ce moment le quartier général interallié sur le front de l’Ouest. Tant qu’à se rendre, autant faire un dernier pied de nez aux Soviétiques. Il signe l’acte de capitulation le 7 Mai, à 2h41. Pour les Alliés, c’est le general Bedell-Smith, chef d’état major de Eisenhower, qui signe. Pour les soviétiques, c’est plus compliqué : le seul gradé présent à Reims à ce moment est le général Ivan Sousloparov. C’est le commandant de la liaison militaire entre l’URSS et les Alliés (en gros, une mission mi-diplomatique, mi-militaire, mais sans troupes). Celui ci est bien embêté : il n’a pas les moyens de contacter Moscou dans le temps imparti, il n’est pas bien sûr d’avoir l’autorité nécessaire pour signer un document d’une telle importance. Il décide finalement de son propre chef de signer l’acte de capitulation. On contacte au dernier moment le général français François Sevez, en qualité de simple témoin.
Si les signataires, pour les Alliés, sont essentiellement des représentants, ils ont l’autorité nécessaire pour le faire, et la capitulation est tout à fait valide. Elle prévoir notamment l’arrêt de tous les combats pour le 8 Mai, à 23h01. L’affaire est donc entendue, la capitulation valide.

Alfred Jödl, signant l’acte de capitulation du 7 Mai 1945

Mais Staline ne va pas l’entendre de cette oreille. Il devient tout rouge (ce qui est normal pour un communiste). On est en train de lui voler « sa » victoire. Il va contacter le commandement allié pour demander que l’acte de Reims ne soit considéré que comme un préliminaire. Il insiste pour qu’un membre du haut commandement soviétique soit présent, et non un simple second couteau. Et tant qu’à refaire les choses, autant les faire bien : la signature aura lieu à Berlin, avec des commandants éminents des différents belligérants. Après tout, ce n’est pas impossible : la fin des combats n’est prévu que pour le 8 Mai durant la nuit, on a donc le temps d’organiser ça tout bien.
Autre problème : si l’acte de capitulation du 7 Mai a été rédigé dans 4 langues (anglais, russe, allemand et français), il est précisé que seule la version anglaise fait foi. Intolérable également, l’acte sera remanié pour y inclure l’acte en russe comme acte de référence. A vrai dire, cela est possible car dans l’acte original, il était stipulé que ce dernier pouvait être modifié ultérieurement. C’est pas comme si les Allemands avaient le choix de toute façon.

Tant qu’à refaire, autant faire en mieux : les soviétiques vont prévoir une signature aux petits oignons, avec un cérémonial comme ils savent le faire. On prévoit également comme signataires du beau monde : pour les Soviétiques, ce sera le maréchal Joukov, qui signera au nom du haut commandement. En représentant du commandement suprême interallié, le air chief marshal Tedder (équivalent à un général d’armée aérienne). Et en qualité de témoin, le général de Lattre de Tasigny pour la France (commandant de la 1ere armée française), et le général Spaatz pour les Etats Unis (commandant des forces aériennes stratégiques). Du côté allemand, on fait venir le maréchal Keitel, le chef du commandement suprême de l’armée allemande.

La signature du 8 Mai, par le maréchal Keitel

Ainsi, la véritable capitulation a bien eu lieu le 7 Mai 1945. Cependant, la signature du 8 Mai, obtenue suite à un caprice du petit père des peuples, est restée, nettement plus prestigieuse.
Mais du coup : pourquoi le 9 Mai chez nos amis slaves ? Tout simplement à cause … du décalage horaire ! La signature a eu lieu peu avant minuit, heure d’Europe centrale. Mais avec le décalage horaire, la capitulation a été enregistrée le 9 Mai, vers 1h du matin. C’est donc à cette date que Moscou a célébré la fin de la guerre en Europe, et pour cela que le « Jour de la Victoire », et son défilé militaire, ont lieu désormais à cette date.

Donc si vous souhaitez vous plaindre que le 8 Mai cette année, est tombé un Samedi, comme le premier Mai, il vous faut accuser Staline. Sans quoi, vous auriez eu un jour chômé Vendredi.

Pour en apprendre plus :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Actes_de_capitulation_du_Troisi%C3%A8me_Reich

Source des images : Wikipédia

Charles V, le sage – partie 2

Reprenons l’histoire de notre jeune Charles, régent de France mais pas encore roi. Il est parvenu, malgré une situation complexe pour lui et le pays, à éviter que deux rivaux ne prennent le pouvoir, et à rallier peuple et noblesse. Il doit cependant composer avec un père prêt à tout pour être libéré, et des Anglais qui attendent la moindre occasion pour achever ce qu’ils pensent être un pays vulnérable. Voyons comment il va faire.

Suite à la bataille de Poitiers, une trêve a été établie entre les royaumes de France et d’Angleterre, mais celle ci s’achève bientôt. Le roi Jean le bon conclut donc à la va vite un nouveau traité avec son rival Edouard III, qui s’avère pire que le précédent : presque la moitié du royaume doit passer sous suzeraineté anglaise, et l’échéancier de la rançon a été réduit. Le dauphin ne peut refuser le traité directement, car cela mettrait son père en difficulté (on rappelle qu’il est toujours tenu en otage par les Anglais). Il décide donc de passer par les états généraux qui, bien entendu, adressent un magnifique doigt levé. L’autre avantage est que cela soude le pays derrière lui, maintenant que les Anglais apparaissent comme une menace commune, et accessoirement, des gros vilains. Edouard III par contre, n’apprécie que moyennement qu’on ait rejeté le traité. Il décide de mener une nouvelle chevauchée à travers le nord de la France, puis aller jusqu’à Reims et s’y faire sacrer roi. Il débarque en Octobre 1359.


Expliquons rapidement ce qu’est une chevauchée dans le contexte. Au début de la guerre de Cent Ans, l’armée anglaise n’est pas assez forte pour conquérir directement le territoire français (+ vaste et + peuplé) ; de surcroît, la guerre ça coute cher, et les dépenses sont soumises au contrôle du Parlement (ce n’est pas vraiment le parlement comme de nos jours, plutôt un équivalent des états généraux aux prérogatives étendues). Pour le convaincre de financer la guerre, Edouard III propose une nouvelle stratégie : une armée mobile (entièrement montée à cheval, même si elle combat à pied – d’où le nom), qui peut ainsi avancer vite, qui plutôt que conquérir des places fortes (ça demande du temps et des gros moyens), avance et pille tout sur son passage. Double avantage : rapidement, l’expédition devient rentable ; et comme elle est très mobile, elle est difficile à contrer, surtout pour l’époque. Le roi de France doit ainsi financer de nombreuses troupes pour défendre un vaste territoire, alors que les Anglais peuvent attaquer là où ils veulent, et ramener des fortunes en Angleterre. Et oui : ça ressemble vachement à un raid de pillage ; d’autant plus cocasse que le pilleur prétend être le suzerain des pillés ; une sorte d’impôt médiéval où en plus on crame ta grange.


La France a du mal à contrer ses attaques, et lorsqu’elle arrive à intercepter les opportuns, cela se passe mal. En effet, la tactique française repose sur des charges de cavalerie lourde, de front. Or, les stratèges anglais ont adapté leur tactique : des rangées de pieux derrière lesquels se retranchent des archers et hommes d’armes à pied (la cavalerie ne servant que de réserve). Ironie du sort : les Anglais ont appris cette technique … en se faisant défoncer par les Écossais, notamment à Bannockburn, par cette même technique. Elle se montre diablement efficace, face à une noblesse française trop sûre d’elle même et indisciplinée. D’où les défaites de Crécy et Poitiers.

Pour information, les différentes chevauchées anglaises, du début du conflit jusqu’à celle de 1359


Et donc, face à cette nouvelle chevauchée, le prince Charles adopte une nouvelle stratégie : celle de la terre déserte (un peu différente de la terre brûlée). Dans les régions menacées, on invite les populations à se mettre à l’abri dans les forteresses, avec leurs provisions et matériel. Les Anglais ne peuvent donc pas piller, et sont contraints d’utiliser leurs maigres réserves. Ils provoquent les chevaliers français (insultent des nobles mamans et montrent leurs fessiers), pour déclencher une bataille rangée qu’ils seraient sûrs de gagner ; mais là également, le dauphin interdit de livrer bataille, et mène une guerre d’escarmouches (on parlerait de nos jours de guérilla) qui usent les troupes ennemies. Le roi anglais arrive devant Reims, portes closes. Or, il n’a pas emmené d’armes de siège (cela l’aurait ralenti) : il a beau gesticuler, agiter les bras en l’air et devenir tout rouge, rien n’y fait. Il continue de parcourir le pays sans pouvoir se ravitailler : les chevaux meurent faute de fourrage, son armée commence à souffrir de la faim. Il pique une grosse colère : ses hommes se mettent alors à tout saccager, brûlant les villages, massacrant tous ceux qu’ils croisent. Ce comportement de fieffés coquins ne fait qu’attiser la haine à leur égard, et renforce la loyauté des sujets du roi de France. Si bien que, lorsque l’armée anglaise se prend un orage de grêles dans la tronche, certains y voient une punition divine. Faisons le point :

  • Edouard III n’a pas obtenu de nouvelle grande victoire, n’a rien pu piller, n’a pris aucune ville, se retrouve avec une armée affaiblie et démoralisée
  • le prince Charles voit certes son pays partiellement ravagé, mais n’a pas perdu trop de population, n’a pas subi de défaite, et surtout voit le soutien de son peuple se raffermir

    Autrement dit : l’expédition est un fiasco. Les Anglais sont contraints de le reconnaître, et accepter de signer un nouveau traité, à Brétigny, le 8 Mai 1360. Seul un quart du royaume passera du côté anglais, et la rançon est diminuée à 3 millions d’écus d’or. Surtout : le roi d’Angleterre renonce à prétendre à la couronne de France, et accepte une trêve. De quoi gagner du temps, ressource précieuse pour le royaume français ravagé.
Le traité de Brétigny

Même si le traité s’est grandement amélioré pour les Français, il reste assez humiliant, et tout le pays, nobles comme roturiers, le vivent mal. La rançon reste colossale, promettant de lourds impôts (plusieurs années de recette fiscale). Le seul qui est content, c’est Jean le bon : cela lui permet de quitter sa captivité de Londres, et revenir prendre les choses en main. La menace anglais est écartée dans l’immédiat, Charles le mauvais est neutralisé en Normandie.

Reste le dauphin Charles qui ne souhaite pas quitter le pouvoir aussi facilement. Le roi le fait écarter (pas écarteler non, faut pas exagérer) du conseil royal.
Le prince du coup part bouder, et va voir son oncle, qui n’est personne d’autre que l’empereur Charles IV, du Saint Empire. Il est en effet très proche de ce dernier, et à chaque fois qu’il est en difficulté, il va le voir pour demander conseil. Celui ci suggère de se concentrer sur la Normandie, que le dauphin a toujours en apanage et qui souffre des mercenaires anglais abandonnés là par Edouard III. Il lève des impôts pour recruter des troupes, sécurise de nombreuses places fortes notamment sur la Seine, de façon à restaurer les échanges commerciaux. Pour le seconder sur les questions militaires, où il ne brille guère, il reçoit l’aide d’un capitaine au nom désormais célèbre : Bertrand Du Guesclin. Nous verrons que l’histoire des deux hommes sera fortement liée, même si on a davantage retenu le patronyme du chevalier.


Du coté de Jean le bon, ce n’est guère brillant. Pour payer sa rançon, il va falloir lever des impôts. Pour stabiliser la monnaie (à l’origine de nombreuses crises dans les décennies précédentes), il crée une nouvelle monnaie à valeur constante en or, qu’il nommera le franc. Il existe plusieurs explications quant à la raison de ce nom : pour certains, c’est juste l’abréviation de Francorum Rex ; pour d’autres, c’est en référence à sa libération prochaine, « franc » signifiant « libre ». Quoi qu’il en soit, la monnaie est un succès. En revanche, les Grandes Compagnies continuent de rançonner le pays, ce qui nuit au commerce, à l’activité économique, et donc à la levée de l’impôt. Jean le bon envoie des troupes les affronter, mais celles ci se font rétamer à la bataille de Brignay, en Avril 1362. Se faire battre par des mercenaires pillards, c’est la défaite de trop. Le peuple avait gardé jusque là une bonne image du souverain : en effet, à la bataille de Poitiers il n’avait pas fui, ce qui était courageux et chevaleresque. Or à l’époque, on préfère un souverain qui a des grosses balls plutôt qu’un cerveau. Mais là, ce nouvel échec provoque une panique et le discrédite totalement. Pour racheter son honneur, il songe à partir en croisade contre les Turcs, mais finalement retourne à Londres en 1364, se constitue en otage, la rançon n’ayant pas été payée (et un autre otage, l’un des fils du roi, garant du paiement, s’est enfui …). Il meurt le 8 avril 1364, à Londres, laissant un pays ruiné et ravagé par la briganderie.


Pendant ce temps, voyant son rival affaibli, Charles le mauvais reprend du poil de la bête. Il prépare une armée en recrutant parmi les grandes compagnies, signe un accord avec le roi d’Aragon. Mais le dauphin a anticipé le coup : il envoie Du Guesclin saisir les forteresses normandes qui appartenait encore au Navarrais. Ce dernier, soutenu par les Anglais, passe à l’offensive, veut empêcher le sacre à venir. Les deux armées s’affrontent à la bataille de Cocherel.
Comme les chefs anglais adoptent la stratégie habituelle de se retrancher derrière des pieux, et d’attendre la charge française, Du Guesclin décide de ruser. Après de longues heures de négociations vaines, il fait croire à un repli des troupes françaises, qui commencent à plier bagages et tourner les talons. Un commandant anglais tombe dans le piège, et s’élance vers les troupes qu’il pense vaincues. Celles ci font brutalement volte face, et se retrouvent rapidement au contact : les archers gallois ne peuvent pas tirer. Rapidement, c’est le massacre, les autres troupes anglaises abandonnant leurs retranchements, et chargeant dans la mêlée. Un groupe de chevaliers français en a profité pour contourner l’ennemi, et attaquer leurs chefs. Privée de commandement, l’armée de Charles de Navarre se disperse.
Le dauphin tient enfin une victoire en bataille rangée. Dans la foulée, il peut se faire sacrer roi, et devient Charles V, le 19 mai 1364. Il a prouvé que les efforts (notamment financiers) n’ont pas été vains.

La bataille de Cocherel

Résumons depuis le début : suite à la capture de son père à Poitiers, le prince Charles devient régent de France, royaume passablement affaibli. Il doit faire face à un rival qui veut prendre le trône, Charles de Navarre, qui est très populaire ; à une révolte des bourgeois parisiens, mené par Etienne Marcel, et voulant établir une monarchie contrôlée ; à une révolte paysanne ; à une menace d’invasion directe des Anglais ; à une mise à l’écart des affaires politiques par son père. Il finit par accéder au trône, avec un pays uni derrière lui, aux finances assainies. Il reste cependant toujours la menace d’une reprise du conflit avec l’Angleterre ; et plus problématique, les Grandes Compagnies qui pillent le pays et perturbent l’économie. Ses meilleures armes jusque là ont été la patience et la diplomatie. Ses outils lui seront ils utiles face aux dangers qui guettent ?

Sources des images : Wikipédia

Charles V, le sage – partie 1

On va abandonner la période contemporaine et ses joyeusetés à base d’obus et de bombes dans la margoulette, pour remonter le temps et nous rendre à une époque où l’on s’entretuait, oui, mais c’était pas grave car on le faisait avec esprit chevaleresque (ou pas …).
Et on va parler plus précisément d’un roi badass (en tant que républicain, cela me coute de le dire, mais il faut savoir reconnaître un bon dirigeant quand on en voit un, fut ce t il roi). Il va hériter d’une situation merdique au possible, mais en alliant sagesse, habileté et patience, va réussir à sortir le royaume de France d’une de ses pires périodes. Et pourtant, qui se souvient de Charles V, dit le sage ? Réparons de suite cette injustice ! En 4 parties, car il va y en avoir des choses à raconter …

Le petit Charles commence bien sa vie, le 21 janvier 1338, puisqu’il est l’ainé de Jean le Bon, roi de France, ce qui lui assure de ne pas trop se prendre la tête pour sa future carrière professionnelle. En 1349, il reçoit en apanage le Dauphiné (c’est à dire qu’il s’en occupe jusqu’à ce qu’il accède au trône), région récemment achetée par la royauté. Il gère son domaine et acquiert ainsi une précieuse expérience ; s’il ne se révèle être ni un grand orateur, ni un farouche guerrier, il fait montre d’un sens aigu de la diplomatie ; ce qui lui sera plus qu’utile par la suite.

Pourtant, on ne peut pas dire que cela soit la joie dans le royaume de France. Nous sommes pour rappel en pleine guerre de Cent Ans. Régulièrement, les Anglais mènent des « chevauchées » sur le territoire, expéditions de pillage menées à cheval (d’où le nom – malin), que le roi de France a bien du mal à contrer. Crécy (1346) a jeté un fort discrédit sur la chevalerie française qui, malgré une supériorité numérique, s’est faite humilier par des archers. Sans oublier la peste qui ravage l’Europe, les mutations monétaires (ancêtre de la dévaluation) qui provoque des crises économiques … Bref, c’est la loose.


Mais attendez, ce n’est point fini ! La cerise sur le coprolithe, c’est que le roi est contesté dans son propre royaume. Il faut comprendre qu’à l’époque, nous ne sommes pas encore en monarchie absolue : l’autorité du roi dépend de la fidélité de ses vassaux, qui gardent une forte liberté. Or, la branche des Valois dont fait parti Jean le bon est contestée, notamment pour la mauvaise conduite de la guerre, mais également car il est un gros bourrin autoritaire (et c’est pas très bien vu par ses vassaux). De fait, Charles de Navarre, roi du pays du même nom, et prétendant au trône de France (car descendant du roi Louis X), en profite pour souffler sur les braises. Il se verrait bien roi à la place du roi, il a un talent d’orateur reconnu, et tente de rallier les mécontents à ses prétentions. On a donc un vieux relent de guerre civile dans le pays.


Or, le Navarrais arrive à convaincre un personnage de poids : le prince Charles lui même. Oui, Charles de Navarre (surnommé plus tard « le mauvais », vous comprendrez pourquoi), et Charles le prince, ça fait beaucoup de Charles, mais suivez un peu bon sang ! Car ce dernier (le prince) estime que l’autorité royale ça se mérite, et que donc son papounet devrait être plus conciliant. Jean le Bon avait confié à son fils la charge de défendre la Normandie. Région importante car contrôlant le trafic fluvial sur la Seine, mais un peu bordélique car divisé entre les fidèles au roi, les supporters de Charles le Mauvais, sans oublier ceux qui se foutent sur la tronche parce qu’ils ne s’aiment pas. Et le petit Charles, en Mars 1355, a donc pour mission de rallier tout ce petit monde ; ce qu’il arrive assez bien à faire. A 17 ans, c’est pas mal quand même ; sachant que de nos jours, la principale activité des ados de 17 ans est de mater « Les chtis vs les marseillais à Guantanamo ». Une autre époque …


Mais un beau jour, alors qu’il festoie avec les seigneurs normands – dont Charles de Navarre -, son butor de papa arrive, arme à la main, et envoie son rival en prison. Cela ne passe pas très bien, et ne fait que saper un peu plus l’autorité royale, à l’inverse de l’effet recherché. Des conspirateurs essaient même de faire croire à Charles que son royal père va l’évincer, mais ce dernier fait un cadeau à son fiston en guise de bonne foi : l’apanage sur la Normandie. Le père et le fils sont rabibochés, le « traitre » Charles de Navarre en prison, cela semble aller mieux. Bon par contre, après ce petit accrochage, la Normandie passe massivement du côté des Navarrais et des Anglais.

L’arrestation de Charles le mauvais, en plein banquet

Et puis arrive le désastre de la bataille de Poitiers, en 1356. Non seulement l’armée française se prend une nouvelle beigne, mais en plus le roi et un de ses fils se font capturer par les Anglois. De nombreux chevaliers étant morts ou prisonniers, la défense du pays n’est plus assurée. Les caisses sont vides, les mercenaires ne sont plus payés et commencer à piller, ce qu’on appellera les « Grandes Compagnies ». Le commerce est paralysé.


Charles, à 18 ans, se retrouve régent d’un pays exsangue. La branche des Valois est discréditée, et lui même à titre personnelle n’a que peu de gloire personnelle, vu qu’il a fui le champ de bataille. Il faut se souvenir qu’à l’époque, la valeur d’un noble se mesurait essentiellement à sa bravoure au champ d’honneur, et non à son intelligence ou son habileté politique. Une fois à Paris, les états généraux (assemblés de nobles, religieux et bourgeois) se réunissent, et sous l’impulsion d’un bourgeois parisien, Etienne Marcel, il est décidé que le jeune régent serait placé sous « contrôle » de ceux ci. Sur le principe, il est plutôt favorable à ce contrôle ; cependant, quand on demande la libération de Charles de Navarre, il refuse car il sait que ce dernier tentera de prendre sa place.
Cependant, les soutiens du Navarrais, dont Etienne Marcel, décide de forcer la main au régent : il est libéré le 9 Novembre 1357, puis accueilli dans de nombreuses villes avec le protocole réservé aux rois. Il finit par arriver à Paris à la fin du mois. Le prince ne peut qu’accepter sa réhabilitation, ou risquer une guerre civile. Charles le mauvais en profite aussitôt pour revendiquer ses droits à la couronne, les états généraux devront trancher. Il retourne également en Normandie afin de lever une armée, pour contrer un éventuel retour de Jean le bon, si ce dernier était libéré par les Anglais. Cependant, les états généraux piétinent sur la question dynastique : la couronne n’est pas encore perdue pour le prince. Rappelons que tout cela se passe alors que le pays est à feu et à sang à cause des brigands, et que la menace d’une nouvelle attaque anglaise n’est pas écartée. La joie …


Jean le bon, depuis Londres, voit ce foutoir et craint de perdre le pouvoir en son absence. Il condamne le contrôle de la monarchie par les états généraux, et négocie rapidement un traité avec les Anglais, contre sa liberté : il est prêt à céder 1/3 du royaume et verser une rançon colossale de 4 millions d’écus d’or. Autant dire que cela passe mal, et Etienne Marcel va en profiter. La contestation vire à l’émeute : le trésorier du dauphin est assassiné le 24 janvier 1358 ; et le 22 février, une foule envahit le palais de la Cité, massacre deux maréchaux en présence du prince, qui est contraint de soutenir les émeutiers. Leur chef pense que l’affaire est faite : il manipulera sans difficulté ce jeune prince terrorisé. Ce dernier n’est pas en l’état de s’opposer pour l’instant par la force, et fait mine de se soumettre. Cependant, il n’oubliera pas cette épisode, qui va le convaincre que ses futurs succès dépendront surtout de l’appui du peuple.

L’assassinat des maréchaux par les Parisiens, en présence du prince

Les états généraux doivent de nouveau se réunir pour décider de la suite, sauf que la noblesse ne veut plus aller à Paris, où vient de se faire tuer je rappelle 2 maréchaux : ils auront lieu en Compiègne. Excellente occasion pour le roi de quitter la ville. Là, il parvient à obtenir l’appui des nobles et d’une majorité des représentants, contre les délégués de Paris. Il commence à rassembler des troupes, en vue de mener le siège de la ville rebelle. Voyant cela, Etienne Marcel prépare la défense de la ville et cherche de l’aide.


Parce que ce n’est pas encore assez le foutoir, les paysans décident que bon, y’en a marre de payer des impôts pour une guerre où l’on ne fait que perdre. Commence alors les Grandes Jacqueries de 1358, de nombreux nobles se font massacrer par des foules en colère. Etienne Marcel les soutient, en envoyant des renforts parisiens. Ils tentent de s’attaquer au dauphin mais l’assaut échoue, les émeutiers se font charger par la cavalerie ; et oui : le tarif à l’époque pour une manifestation interdite, c’était plusieurs centaines de kg dans la tronche, plus coups d’épée et de lance. Tout se perd ma bonne dame.

L’attaque du marché de Meaux par les Jacques, réprimée par une charge de cavalerie


Charles le mauvais, lui, voit l’occasion de rallier la noblesse à sa cause : il décide de s’occuper de ces gueux qui n’ont pas compris où étaient leur place. Il parvient à prendre par surprise le chef des Jacques (non pas qu’ils s’appellent tous Jacques ; c’est le nom donné aux paysans révoltés, d’où « Jacquerie »), et fait massacrer les autres. La révolte est matée au prix d’un bain de sang ; sauf que ledit sang est sur les mains de Charles de Navarre, le prince lui reste propre.
Durant l’été 1358, Charles le mauvais retourne à Paris, pensant tenir enfin le pouvoir ; il conclut une alliance avec Etienne Marcel. Sauf qu’une fois les jacqueries vaincues, la plupart des nobles font défection et retournent auprès du dauphin, qui a tout loisir pour assiéger Paris. Les deux alliés, à court de troupes, font donc appel à des mercenaires anglais. Très grosse erreur, tant la haine du godon est inscrite dans les gènes français ! Très rapidement, ces troupes seront davantage vus comme des occupants que des défenseurs, et des tensions éclatent. Le 21 Juillet 1358, une rixe entraine la mort d’une trentaine d’archers. Etienne et Charles s’adressent à la population pour calmer tout ce petit monde, mais l’effet inverse se produit : on exige le départ des Anglois. Du coup, ils optent pour un apaisement définitif à coups de flèches : ils mènent la foule par petits groupes dans de véritables embuscades où les attendent les mercenaires honnis. Bilan : 600 à 700 morts pour les Parisiens.


Autant dire que l’affaire passe mal. On accuse Etienne Marcel et Charles le mauvais d’être de mèche avec les mercenaires étrangers. Pire, une rumeur sur une armée anglaise, approchant la ville pour la piller et venger leurs camarades, échauffe davantage les esprits. Alors qu’Etienne Marcel essaie de se faire remettre les clés de la ville, on lui tend, à son tour, une embuscade : au signal convenu (la phrase « Qu’est ce que ceci ? »), il se fait trucider ainsi que ses partisans. Tel est embusqué celui qui avait embusqué. Suite à cela, la ville décide de se rendre, et d’ouvrir ses portes au prince (qui est le premier surpris). Magnanime, il accorde son pardon aux parisiens. De fait, seules 15 personnes sont exécutées pour trahison, et il s’assure que les familles ne subissent pas de représailles.

L’assassinat d’Etienne Marcel


Charles le mauvais lui, s’est retiré sur Saint Denis avec ses troupes, qui n’ayant pas été payées, pillent la ville. Il finit par retourner en Normandie, mais les mercenaires anglais se mettent alors à rançonner la région et les trafics fluviaux. Le dauphin n’a pas les moyens de les vaincre, donc il laisse pourrir la situation ; ce qui finalement, lui est bénéfique : le Navarrais et les Anglais sont de plus en plus détestés.

Le prince Charles, qui n’est encore que régent, était dans une situation passablement moisi. Menacé par une double guerre civile (les bourgeois parisiens d’Etienne Marcel, et son rival Charles le mauvais), il est parvenu à éliminer le premier, et provisoirement repoussé le second. Le tout en parvenant à souder derrière lui la majorité du peuple et de la noblesse. Mais la France reste dans une position compliquée : le pays est ruiné, ravagé par les grandes compagnies, affaibli militairement après la défaite de Poitiers, et la menace d’une invasion anglaise reste entière. Et pour le dauphin, il doit faire face à deux prétendants à sa future couronne (le roi anglais et le navarrais), et à son propre père, prêt à solder le royaume en échange de sa liberté.

Comment va t il s’en sortir ? Nous le verrons dans la 2e partie.

En bonus, une petite carte qui rappelle le bazar ambiant

Sources des images : Wikipédia

La crise des obus de 1915

Aujourd’hui on va parler d’une crise qui n’a pas été anticipé. De responsables qui n’ont pas su la préparer, constituer des stocks ou des filières de production. Et du coup, au bout d’un temps assez bref, on se retrouve à court. L’histoire propagée par des journaux avides de scoops, et qui font des émules dans l’opinion publique, réclamant des têtes (qui tombent … parfois).
Bien entendu, je parle de la crise des obus de 1915. Bien sûr, toute ressemble avec une crise plus récente ne serait qu’une facétie de l’Histoire.

Tout commence en 1914. Cette année là, les Européens décident qu’il est grand temps d’aller joyeusement se planter du fer dans le bidou. Et vas y qu’on est les meilleurs, d’abord nous notre symbole ce sont trois bonasses, alors que vous votre patron c’est un gros moustachu ; ach, z’est pas très chentil de ze moquer de notre kaiser, fiens là qu’on te gasse la tronchje, ezpèze de démocrate ! Des arguments de haut vol s’il en est.

Triple entente vs triple alliance


Cette guerre, tout le monde l’attendait plus ou moins, certains la souhaitaient même (ils la mettaient sur la liste pour Saint Nicolas – le père Noël n’ayant pas commencé son service à ce moment). Mais au final, personne n’y était vraiment préparé. A part les Allemands (encore eux, damned !). En effet, nos brave teutons, soucieux de ne pas déroger à leur réputation d’excellents organisateurs, avaient prévu une guerre moderne (pour l’époque) : artillerie conséquente (notamment lourde), et surtout stocks de munitions et filières d’approvisionnement efficaces.

Tout le monde (y compris les Allemands pour le coup) avait prévu une guerre courte : avant Noël 1914 c’était fini, on serait de retour à la maison. La France avait fait le pari d’une guerre de mouvement, comme en 1870 (caramba ! encore raté). La Russie était un pays encore très rural, son armée, quoique très nombreuse était en cours de modernisation (on avait environ 1 fusil pour 2 soldats). Quant au Royaume Uni, c’est encore mieux : pas de conscription, la guerre on a pas vraiment envie d’y aller, mais là les Allemands ont envahi la Belgique qu’on est censé garantir, donc bon, on y va quand même. (note : pour les autres belligérants, je n’ai pas spécialement de données, mais il semblerait que ce n’était guère plus brillant)
Sauf qu’au bout de quelques mois, le front Ouest se stabilise, la guerre de mouvement est finie, on entre dans l’ère de la guerre des tranchées. Nouveau type de guerre, nouvelle tactique : désormais, avant de monter à l’assaut on tartine les lignes ennemies avec force quantité d’obus, qui, en retour, nous en rebalance tout autant. Ce qui est bien, mais nécessite cependant une chose : des munitions, beaucoup. Or, sur ce point, le Royaume-Uni et la France vont vite se retrouver dépassés.

Le scandale part d’une petite phrase. Nous sommes en Mai 1915, durant la bataille de l’Artois : attaque franco-britannique, qui bien sûr se voulait décisive mais, malgré quelques succès, ne parviendra pas à rompre le front. Un journaliste du Times interroge le commandant britannique, Sir John French (ça ne s’invente pas), et lui demande les causes de l’échec. Ce dernier, ne voulant pas reconnaître ses erreurs, déclare : « nous sommes tombés à court de munitions ». Ce qui est partiellement vrai : par ex. à Neuve Chapelle, le bombardement préliminaire a été raccourci à cause d’un stocks de munitions « faible » (notion toute relative : l’artillerie britannique tirera tout de même + de 200 000 obus).
Quoi qu’il en soit, la remarque fait l’effet d’une bombe au Royaume-Uni. Le Times titre : « The shell scandal » (le scandale des munitions). Les autres journaux en rajoutent une couche. On accuse le gouvernement d’avoir mal préparé le pays, l’artillerie se retrouvant à court d’obus en à peine quelques mois de conflit. Ceci, ajoutés à d’autres débâcles (les Dardanelles notamment), finit par provoquer la chute du gouvernement, remplacé par un gouvernement de coalition. En France, l’histoire fait moins d’émules, mais le même problème se pose. Il faut augmenter la production, non seulement d’obus, mais de tout : du fusil au canon lourd, en passant par les nouvelles armes (bombes pour avions, obus à gaz, pour mortiers, balles de mitrailleuses, …).

Jusque là, la production d’armes et munitions était assurée par des arsenaux d’état. Pour démultiplier les capacités productives, les gouvernements se tournent vers l’industrie privée. Cependant, vu qu’on veut pas non plus les laisser faire n’importe quoi, et pour assurer une coordination nécessaire, on va créer un ministère des munitions, aux prérogatives étendues : de l’approvisionnement des matières premières à l’acheminement dans les dépôts, en passant par le contrôle qualité, les filières de transport, et le recyclage des douilles usagées.
Ces organisations vont monter en puissance, et avoir un impact considérable, non seulement pour les pays concernés, mais aussi pour le monde entier. Des industries diverses sont converties (et notamment, l’industrie automobile – on va y revenir). Les hommes étant au front, on va faire appel à la main d’œuvre féminine (les fameuses « munitionnettes »). Les conséquences sont également sociales : le droit de grève est interdit dans les usines d’armement, la démission sans consentement de l’employeur, parfois il est même interdit de s’asseoir ! En revanche, on s’intéresse aux risque professionnels, à la santé des travailleurs (un ouvrier malade ça travaille moins bien il paraît …), et des progrès sont enregistrés de ce coté.

Des ouvrières anglaises de l’industrie des munitions


Le succès va être progressif, mais réel. Au début, il faut simplifier les procédures de fabrication, former les ouvriers, construire les locaux, acheter les machines, … Cela prend du temps, la qualité en pâtit : presque un obus sur 5 s’avère être défectueux, n’explose pas ou au mauvais moment (souvent, dans le fût du canon, ce qui est préjudiciable aux pauvres artilleurs qui sont à côté). Mais en quelques mois, les problèmes sont résolus et la production explose (au bon sens du terme). On dispose enfin d’assez de matériel pour rivaliser avec les boches.

Un stock d’obus britannique

Et une fois la guerre finie ? Même si les besoins militaires chutent, les conséquences seront durables. L’industrie a profité de sa réorganisation pour devenir plus productive (et notamment, la production automobile). Les soviétiques disaient « quand on sait produire un tracteur, on sait produire un char » ; 30 ans avant, l’inverse s’est révélée tout autant exacte. Pour les obus, on avait besoin de nitrates, qui entraient dans la composition des explosifs ; ils seront utilisés dans la production d’engrais. Et l’industrie chimique, et ses gaz de combat ? Elle va désormais combattre … les insectes.
Prenons maintenant un exemple, de quelqu’un de pas très connu : André Citroën. A l’époque, ce monsieur est avant tout un ingénieur mécanique, et un industriel modeste. Mais André, il a des idées, surtout depuis qu’il a visité les usines d’un certain Henry Ford. Lorsqu’il est mobilisé dans l’artillerie, il constate vite qu’on manque de munitions. Et quand la crise éclate, il en profite : il va voir des responsables de l’armée, et leur dit « filez moi de la thune, je vous filerai des obus ». Soit, banco dit le général responsable de l’artillerie. Il se met au travail. En + de ce que lui a donné l’état, il emprunte de l’argent un peu partout, famille, amis, banques. Il achète des terrains quai de Javel, à Paris, pour agrandir son usine, qu’il fait relier à la voie ferrée à ses frais. Il fait construire avec des matériaux simples et bons marchés, comme de la tôle ondulée. Il se fournit également en machines, notamment des presses industrielles américaines.

Usine Citroën, quai de Javel


Et il embauche : des ouvriers démobilisés, mais aussi des femmes, jusqu’à 50% de la main d’œuvre. Les équipes travaillent jour et nuit, jusqu’à 11h par jour, Dimanche compris. Le règlement intérieur est strict, il est même écrit « Défense de s’asseoir. Défense de causer. Défense de faire grève ». Cependant, il n’est pas indifférent au sort de ses employés : il fait construire une cantine qui sert 3 500 repas, les ateliers disposent d’une pouponnière (on parlerait de « crèche » de nos jours), de services médicaux, et même d’une coopérative proposant aliments, charbon, vêtements et autres produits de première nécessité. Pour l’époque, c’était novateur, même si pas désintéressé.
Comme partout ailleurs, cela prend du temps, mais le résultat finit par arriver. En 1916, il produit environ 10 000 obus/jour, pour finir à un maximum de 50 000 obus/jour. Difficile de se représenter ce que cela fait, mais pour comparaison, au début de la guerre les arsenaux français en produisent environ 13 000/jour. Au total, pour toute la guerre, les usines Citroën vont fournir 26 millions d’obus. Ce qui est pas mal (mais en fait pas tant que ça, toujours par comparaison, à Verdun Français et Allemands se sont échangés 53 millions d’obus).
Et après guerre ? Notre bon Citroën a gagné beaucoup d’argent, et il a prévu le coup : il peut enfin mettre ses idées en œuvre pour l’industrie automobile. L’usine quai de Javel n’est pas démantelée, mais reconvertit pour produire des automobiles. Il faut remplacer les chevaux morts durant le conflit, et quoi de mieux qu’un engin motorisé ? La production est tellement importante que la France produira en 1919 plus de voitures que les Etats Unis ou l’Allemagne. En Janvier, André Citroën annonce un nouveau modèle moitié moins cher que le modèle le moins cher du marché ! Paris devient la capitale de l’automobile. Sans entrer dans les détails, la marque aux deux chevrons connaitra des succès, des échecs, pour finalement devenir le poids lourd que l’on connaît aujourd’hui.

Donc la prochaine fois qu’on vous parlera d’une crise équivalente, et qu’on vous sortir tout un tas de solutions, vous pourrez dire que la dernière fois, on s’en est sorti avec un savant mélange de contrôle étatique, d’initiatives privées, d’assouplissements sociaux et en parallèle de nouveaux droits, et que cela a fini par l’émergence de nouveaux géants industriels. Et bien entendu, l’état a même trouvé le moyen de regagner une partie de l’argent qu’il avait dépensé, avec un impôt exceptionnel sur les bénéfices de guerre. Malin.

Pour aller + loin :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Crise_des_obus_de_1915
https://fr.wikipedia.org/wiki/Andr%C3%A9_Citro%C3%ABn
https://fr.wikipedia.org/wiki/Contribution_exceptionnelle_sur_les_b%C3%A9n%C3%A9fices_de_guerre (notre talent national pour créer de nouveaux impôts)
https://www.passionnement-citroen.com/post/histoire-citroen-l-usine-du-quai-de-javel

Sources des images : Wikipédia, blog https://www.passionnement-citroen.com

Pearl Harbor : une attaque surprise ?

Dimanche 7 Décembre 1941. Ce jour ci, des Japonais fort taquins vinrent distribuer bombinettes et petites torpilles sur une flotte américaine quelque peu endormie, en ce jour de repos dominical. Dans le pays, c’est un peu la consternation, tant saccager ainsi le brunch après la messe n’est pas très sympathique. Les militaires sont incrédules, le président déclare devant le Congrès que le 7 Décembre sera « une date qui restera à jamais marquée dans l’Histoire comme un jour d’infamie ». Le choc est tel qu’à la base elle même, il faudra attendre de longues minutes avant que la situation ne soit vraiment comprise. La nation, traumatisée, se jettera alors à corps perdu, comme un seul Homme, dans le conflit mondial en cours, changeant radicalement le rapport de force (même s’il faudra quelques temps avant que la machine de guerre US ne tourne à plein régime).
Aujourd’hui encore, la date reste gravée dans la mémoire collective, comme l’une des journées les plus marquantes pour le pays. Et le plus souvent, on la retient comme une surprise totale, n’ayant été nullement anticipé. Mais est ce vraiment le cas ? A quel point fut elle une surprise ? N’y a t il pas eu des signes ? Ou bien des erreurs, coté US, des négligences, ayant favorisé ou amplifié le drame ?
L’article de ce jour va apporter des éléments de réponse à ces questions. Nous allons parler de avant, pendant, et après, mais n’allons pas tout détailler sur l’attaque (qui fera sans doute l’objet d’autres articles, tant il y a à dire !). Alors : surprise, négligence, ou même complot ?

Les causes du conflit Etats Unis/Japon

Pour commencer, il faut comprendre la motivation de l’empire du Soleil Levant, à couler du gros cuirassé ‘ricain … Et ça remonte à presque un siècle.
A ce moment, le pays était franchement isolationniste, et refusait de s’ouvrir aux autres (culturellement, commercialement et technologiquement). Jusqu’au jour où les États Unis, alors en pleine expansion dans le Pacifique, vinrent frapper à la porte avec une flotte de guerre : c’est l’expédition du commodore Perry, dont j’ai déjà parlé (cf. article sur Jules Brunet).
Craignant d’être à terme colonisé comme le reste du monde, le Japon choisit la voie de modernisation. Et ça marche plutôt bien : non seulement le pays résiste à une mise sous tutelle occidentale, mais parvient même à faire jeu égal, en se dotant d’une armée, marine et économie moderne. Les ambitions du pays vont alors se débrider : il veut établir son propre empire colonial. Ainsi, à partir de la fin du 19e siècle, le Japon colonise Formose (connu maintenant sous le nom de Taïwan), la Corée, plusieurs îles du Pacifique (récupérées notamment de l’Empire Allemand, après la défaite de la 1ere guerre mondiale … mais c’est une autre histoire), et établi des intérêts en Chine.

Mais, étant arrivé tard dans le jeu du partage du monde entre les empires coloniaux, le Japon ne récupère que les miettes. Or, pour se développer, l’industrie nippone a besoin de ressources naturelles (le territoire national étant pauvre de ce côté ci), et de débouchés commerciaux. Les autres grandes puissances ont tendance à cadenasser hermétiquement leurs propres sphères d’influence, et d’autant plus à partir de la Grande Dépression de 1929. Ainsi, l’économie du pays va mal.
Deux solutions complémentaires vont être appliquées. La première : fabriquer des armes (notamment des bateaux), pour faire tourner l’industrie. Et la deuxième : étendre la zone d’influence japonaise, par les armes s’il le faut (d’où le premier point – malin). Une cible est toute trouvée : la Chine. Ce n’est pas une colonie occidentale (même s’ils y ont de nombreux intérêts), le pays est riche en matières premières, a une forte population (consommation et main d’œuvre), mais surtout il est considéré comme « faible » : divisé entre plusieurs seigneurs de guerre, avec un pouvoir central peu efficient, des partis politiques qui s’affrontent (et ça débouchera d’ailleurs sur une guerre civile entre communistes et nationalistes), corrompu, peu moderne, … Bref, la proie idéale.

Cela dit, le « morceau » a l’air un peu trop gros pour être mangé et digéré en une fois. Alors on va procéder par étapes. Et l’armée japonaise commence en 1931 avec la Mandchourie (Nord Est de la Chine actuel) : ils organisent un attentat contre une voie de chemin de fer leur appartenant (concept pouvant paraitre étrange, mais finalement très utilisé dans l’Histoire), pour justifier une intervention militaire et une pacification de la région. Et dès 1932, un régime fantoche est installé, le Mandchoukouo, en théorie autonome mais en fait directement soumis à Tokyo.
Puis, en 1937, prétextant d’un autre incident (un soldat japonais aurait été enlevé … en fait il était juste dans une maison de passe), l’armée japonaise attaque la Chine, et ce, sans déclaration de guerre. Mal préparées, les troupes chinoises se font repousser, si bien qu’en quelques mois les Japonais s’emparent d’une large bande côtière, et s’y comportent comme d’odieux marauds (massacres, viols, exploitation de la population, et j’en passe). Il y a bien quelques protestations à l’international (on leur fait les gros yeux), mais les Européens sont assez occupés avec ce qui se passe chez eux à partir de 1938, donc on oublie ces évènements lointains. Les États Unis eux, sont davantage concernés : ils ont des relations importantes avec la Chine, et décident de la soutenir, tout d’abord en leur envoyant du matériel, et un peu plus tard, des volontaires (notamment la fameuse escadrilles des « Tigres volants »). L’invasion du pays ralentit, les forces chinoises se sont repliées dans des territoires montagneux ou désertiques, et à l’instar de l’URSS en 1941, la taille du pays leur permet de « tenir », même si difficilement.

Voyant le peu d’oppositions que suscitent leurs « aventures », les autorités nippones se disent que, allez, on remet une pièce. Ils tentent d’abord de pousser du coté de l’URSS, là encore en prétextant des incidents frontaliers, et sans déclaration de guerre (ça devient une habitude … mais retenez bien ceci). Sauf que là, ça ne passe pas, et l’armée japonaise se prend une volée. Après avoir arrangé la chose avec les soviétiques (qui n’ont également pas que ça à faire), ils décident de changer de cible : on va se tourner vers le Sud-Est asiatique, et y établir une « sphère de co-prospérité », avec à la tête bien entendu le Japon (faut pas déconner non plus, tu croyais à l’égalité entre les peuples toi ?). Oui, mais la région est largement occupée par les Européens et les Américains.
Alors du coup, on va commencer facile, avec l’Indochine française. Nous sommes en Septembre 1940 : la métropole vient tout juste de se faire blitzkrieger (oui, c’est un verbe que je viens de créer). Les Japonais formulent des exigences auprès des autorités coloniales, qui les acceptent, mais on lance l’assaut quand même, car on a amené plein de soldats à la frontière, donc faut pas qu’ils s’ennuient. Les troupes françaises, en sous nombre et mal équipées, sont mises en déroute. Du coup, un nouvel accord est signé, d’autant plus que le Reich est en bon terme avec le Japon impérial (ils ont signé un pacte), et Hitler pousse le régime de Vichy à se montrer « coopératif ». L’armée nippone s’installe ainsi en Indochine, mais tout en laissant le colonisateur français en place.

La guerre devient (presque) inévitable

Là encore, la plus forte réaction vient … des États-Unis. Pas tellement pour défendre les intérêts français, mais plutôt les leurs : ils estiment qu’à terme, ceux ci seront menacés (et non sans raison). Le pays n’est cependant pas vraiment chaud pour une guerre, alors on applique la bonne vieille tactique de la sanction économique : tant que les troupes japonaises n’auront pas évacuées l’Indochine, et la Chine (hors Mandchourie), paf, plus de pétrole, et les avoirs japonais au pays de l’oncle Sam, bloqués. Le Royaume Uni et les Pays Bas (qui contrôlent notamment l’actuel Indonésie) suivent peu après, et cela met l’empire du Soleil Levant en difficulté : en effet, il est presque totalement dépendant de ses importations pour le précieux liquide noir, et faire la guerre sans risque de s’avérer vite compliqué. Les autres producteurs de pétrole sont occupés par ailleurs, et c’est presque 90% de l’approvisionnement en or noir du Japon qui part en fumée.

Face à cette crise, deux options (chacune avec leurs défenseurs) s’offrent aux responsables japonais :

  • céder aux exigences américaines (éventuellement, en négocier une partie), et de fait, accepter la suprématie de ces derniers sur l’Asie et le Pacifique, devenir une puissance de 2e ordre ; les éléments civils du gouvernement sont globalement partisans de cette solution, pensant que l’on peut obtenir des concessions de la part des Yankees
  • envahir la Malaise britannique et les Indes néerlandaises, riche en ressources naturelles (notamment pétrole et caoutchouc), afin d’assurer l’indépendance du pays, et à terme, établir une domination japonaise sur toute la région, et même jusqu’à l’Inde ; ce qui signifie cependant, qu’en plus d’entrer en guerre avec les deux pays concernés, devoir faire face à une intervention certaine des États-Unis
    Les militaires étaient pour la plupart partisans de la 2e solution ; mais ils étaient eux même divisés, entre les optimistes (qui jugeaient les Américains comme faibles et pacifistes), confiants dans une victoire, et les sceptiques, qui craignaient une mobilisation de l’industrie US, capable à long terme de submerger les forces japonaises sous le poids du nombre.

Le temps presse : le 6 Septembre 1941, on décide de faire les 2 à la fois. D’un côté, les partisans des négociations ont quelques semaines pour tenter de trouver un accord honorable avec les USA ; de l’autre, on prépare la guerre, et des actions contres les positions britanniques et américaines dans les Océans Indien et Pacifique, au cas où la diplomatie échouerait. Position d’équilibriste avalisée par l’Empereur en personne, qui aimerait bien s’entendre avec les USA, mais sans avoir l’air de se coucher. Les négociations reprennent donc à Washington.

Du coté US, les appels du pied japonais sont perçus différemment : le secrétaire d’État Hull (équivalent du ministre des affaires étrangères) se montre intransigeant, et à défaut d’une acceptation de leurs demandes, ces discussions ne sont pour les Japonais qu’un moyen de gagner du temps. Roosevelt lui est nettement plus conciliant : il prévoit que son pays entre en guerre, mais il préfère viser l’Allemagne et l’Italie ; le Japon est davantage perçu comme un concurrent que comme un ennemi (malgré les rapprochements évidents avec l’Axe), avec qui on peut encore s’entendre (comme on l’a fait pendant presque un siècle).

Dans tous les cas, aucun progrès n’est enregistré : les deux puissances restent sur leur position respective, peu de concessions sont faites. Le premier ministre japonais Fumimaro Konoe – un civil -, prend conscience que la seule issue diplomatique possible implique le retrait de Chine, et donc, sans cet « effort » coté japonais, la crise ne finira pas. Il finit par démissionner en Octobre, n’étant pas partisan de la solution militaire. Et il fut remplacé par Hideki Tojo, alors ministre de l’Armée Impériale, un militaire dévoue corps et bien à l’Empereur, mais également favorable à une action belliqueuse (ce qui était un « indice » de plus pour les Ricains). On continua cependant toujours les négociations, en faisant davantage de concessions, qui auraient pu être acceptées par les États Unis … si ceux ci ne savaient pas que le Japon préparait une attaque. En effet, les services de renseignement avaient depuis longtemps cassé les codes japonais, et ils étaient donc informés des préparatifs japonais. Cela finit de persuader le secrétaire d’État Hull que les pourparlers n’étaient qu’un moyen de gagner du temps, et refusa dès lors tout compromis. La guerre était – presque – inévitable, et on le savait des deux cotés.

La préparation du plan japonais

Du côté japonais, optimistes comme sceptiques sont tous d’accord sur un point : la guerre, puisqu’elle doit avoir lieu, doit être aussi courte que possible. L’économie japonaise étant nettement inférieure à celle des USA, seule une victoire décisive obtenue rapidement devrait convaincre l’oncle Sam de renoncer et négocier. Il faut préparer une sorte de Blitzkrieg version maritime, avec toutes les contraintes imposées par la taille du Pacifique.

Il se trouve que les deux côtés s’y préparent … et depuis longtemps. En effet, même si officiellement « amis », les deux pays sont conscients depuis le début du 20e siècle que leurs intérêts dans le Pacifique finiront par les opposer, et les deux marines se développent en conséquence. Là, le pays des sushis part avec un énorme handicap : , à la fin des années 1930, le seul budget de l’US Navy est équivalent à celui … de l’état japonais tout entier (et pourtant non négligeable en terme de PIB) !
Les samouraïs des mers sont parfaitement conscients de ce rapport de force défavorable ; et savent qu’ils devront la jouer fine s’ils veulent l’emporter. La théorie dominante à l’époque est celle de la « bataille décisive de cuirassés » : si guerre il y a, elle commencera par une successions d’escarmouches limitées, pour finir en apothéose par une grosse bataille, opposant tous les cuirassés des deux camps, ceux ci essayant de coller le plus d’obus dans les flancs des autres, et les envoyer faire de la plongée sous marine. Le camp qui aurait encore des navires en état de naviguer à la fin serait le vainqueur, et obtiendrait la suprématie navale pour quelques années. Sachant que l’US Navy aura sans doute plus de navires qu’eux, mais qu’ils devront traverser le Pacifique pour venir jouer à la guerre, il faudra les harceler sur toute la route avec des unités légères, afin d’avoir une quasi parité numérique ; et lors de la bataille finale, les Japonais l’emporteront grâce à des cuirassés plus rapides, mieux armés, et très bien entrainés. Et après, on sera pépouze pour quelques temps.

Bref, c’est une sorte de mélange entre la Jeune et la Vieille Ecole française du début du siècle (cf. article à ce sujet). Pour le harcèlement, on envisage plusieurs moyens : des navires légers armées de torpilles, des sous marins et … des portes avions. En effet, le Japon est sans doute le pays ayant le plus perçu le potentiel de cette nouvelle arme : sans la considérer comme la pièce maitresse d’une flotte, elle a construite la première flotte aéronavale au monde, en poussant notamment l’entrainement des pilotes au maximum.

Quant à l’idée d’attaquer une flotte directement dans sa base, elle est inspirée par les Britanniques. En Novembre 1940, ceux ci ont réussi un coup de maître lors de la bataille de Tarente (qu’on appellera d’ailleurs par la suite, le « petit Pearl Harbor italien » ; en fait, il eut mieux fallu appeler Pearl Harbor le « gros Tarente US », mais ça sonnait moins bien). Avec un seul porte avion, et des vieux biplans Swordfish, la Royal Navy a réussi à couler 1 cuirassé et à endommager 2 autres de la Regia Marina (marine italienne), le tout dans un port pourtant censé protéger contre de telles attaques. L’amirauté japonaise va envoyer une mission en Italie, pour analyser l’attaque, et voir si y’a pas moyen de refaire la même.

Et de fait : on se dit que si avec un seul porte avion, et des avions tout pourris, les Anglais ont réussi un beau carton, on devrait pouvoir faire mieux avec plus de porte avions, et des appareils plus modernes. On commence à préparer cette attaque, sous la direction de l’amiral Isoroku Yamamoto, grand partisan des porte avions. Paradoxe : Yamamoto n’était pas favorable à la guerre (qui l’estimait perdue d’avance, et de par ses affinités avec les États Unis), et le patron de la Marine Impériale, l’amiral Nagano, estime que le plan est très risqué. Pourtant, le projet est présenté à l’Empereur, qui l’approuve en Novembre 1941. Les équipages s’entrainent, malgré le peu de temps restant, de façon efficace.

L’amiral Yamamoto, le promoteur de l’attaque de Pearl Harbor

L’élément de surprise est absolument crucial : si la base venait à être en alerte, l’attaque serait estimée trop risquée, et donc annulée. Pourtant, autant l’empereur que l’amiral Yamamoto insisteront pour que la guerre soit déclarée aux États Unis AVANT l’offensive. Oui : le pays qui jusque là a déclenché moult conflits sans prendre la peine d’envoyer un petit télégramme pour dire « on vient vous poutrer, bisous », là, insiste pour qu’on fasse les choses dans les règles. Soit, on déclarera la guerre juste quelques heures avant le début de l’attaque. Début Décembre 1941, alors que le choix de la guerre est arrêté, on envoie un message à l’ambassade japonaise à Washington : le 7 Décembre, un message sera envoyé, et devra être remis au gouvernement US dans les délais, 13h heure locale pour être exacte. Avec le décalage horaire, cela fera 7h30 à Pearl Harbor, soit quelques minutes avant l’attaque. C’est très serré, mais peu importe.

Coté US : incrédulité, impréparation et erreurs

Aux États Unis, on a également entendu parler de Tarente. On sait que les Japonais, bizarrement, s’y intéressent. Mais la plupart des experts sont formels : le même coup est IMPOSSIBLE à Hawaï. Essentiellement, car le Pacifique est bien plus grand que la Méditerranée (bien vu !) ; si une flotte de porte avions devait appareiller du Japon, on la verrait venir et on aurait le temps de donner l’alerte.
Pourtant, un amiral US prévint que si, le risque est réel. C’est l’amiral Harry Yarnell, qui dès les années 1930, alerta sur les risques d’une attaque aérienne par le Nord de l’archipel (bien vu, c’est par là que les vagues d’appareils nippons passeront). Il réussit même à démontrer sa théorie lors d’un exercice mais non : IMPOSSIBLE. Il partit donc bouder dans son coin, et on l’oublia. Inutile de dire qu’il dut faire quelques doigts après l’attaque.
Ahhhhh ! Le coup classique du « on vous l’avait bien dit », mais ignoré par tout l’état major parce que non, on n’y croit pas.

Cela dit, on est quand même conscient qu’il se passe quelque chose : les troupes japonaises sont très actives du côté de l’Asie du Sud Est. On met donc en alerte un certain nombre de bases, notamment aux Philippines et à travers le Pacifique. Mais pas Hawaï : invincible on vous a dit !
Dans les différentes installations, les mesures prises sont donc inadaptées. Dans la baie, les navires sont rangés côte à côte, pour gagner de la place, mais les rendant beaucoup plus vulnérables aux attaques à la bombe et à la torpille. Sur les aérodromes, ce n’est guère mieux : les avions sont rangés hors des hangars, aile contre aile ; on craint en effet les saboteurs (il y a de nombreux Japonais d’origine sur l’île, et même si la plupart n’en ont rien à faire de la guerre, on les soupçonne), et c’est la disposition la plus simple pour les surveiller (et accessoirement, pour se faire bombarder). Enfin, le personnel militaire n’est pas en alerte.

La base de Pearl Harbor, un peu avant l’attaque, et notamment le principal mouillage des navires

La flotte japonaise appareille le 26 Novembre. Et malgré la présence de 6 porte avions, elle passe en effet inaperçue … L’amirauté a choisi de la faire arriver par le Nord, en évitant les routes commerciales, et ça fonctionne. Nous sommes en hiver, les conditions météo sont peu propices à la détection, la flotte se faufile et arrive à quelques centaines de kilomètres seulement d’Hawaï, lorsque le 6 Décembre, elle reçoit la confirmation de l’ordre d’attaque. Durant la nuit, les préparatifs s’effectuent par gros temps, ce qui complique le travail mais le rend d’autant plus furtif.

Nous arrivons au 7 Décembre, jour de l’attaque. Là encore, plusieurs signes devraient mettre la puce à l’oreille des forces US, mais seront ignorés ou mal interprétés.
Tout d’abord, du coté diplomatique. L’ambassade japonaise à Washington reçoit bien le message à transmettre … mais seulement 1 à 2 heures avant la date limite. Or, le message est codé, il contient 14 points (dont seul le dernier, déclarant la guerre, est en fait vraiment pertinent). Pour le décoder, puis le traduire, cela va prendre du temps. Il aurait été plus simple d’envoyer un message avec juste un point (« on vient vous refaire le museau »), mais non : le Japonais aime faire compliqué.
De façon assez paradoxal, les premiers à le décoder seront les services de renseignement américains. Leurs machines sont plus performantes que celles de l’ambassade, et ils auront une version du document AVANT les diplomates japonais. Seul le dernier point (la déclaration de guerre) n’est pas décodé. Cela dit, le reste est tout de même assez préoccupant pour qu’on prévienne le chef d’état major de l’armée de Terre, le général George Marshall.
Sauf que nous sommes un Dimanche … et le Dimanche, le général fait de l’équitation. Quand il revient de sa promenade équestre, il n’est pas trop tard, mais beaucoup de temps a été perdu. Inquiet, il envoie un télégramme aux différentes bases du Pacifique et en Asie, indiquant de se préparer à une attaque. Mais pas de pot : si la plupart des troupes l’ont reçu à temps, celui à destination de Pearl Harbor arrivera bien après le début de l’attaque. Il serait intéressant de connaître la réaction de l’opérateur qui reçut le message (« non sans blague, on est attaqués ? » avec les bruits d’explosion et les incendies dehors).

Du côté de la base, on a également eu plusieurs indices. Tout d’abord, des sous marins sont repérés aux alentours, par des navires en patrouille. Et pour cause : la flotte japonaise a envoyé des sous marins de poche, pour surveiller les mouvements de la flotte américaine et torpiller les navires qui tenteraient de quitter la rade, une fois l’assaut aérien lancé. L’un d’entre eux se fait repérer, puis un autre, qui est même envoyé par le fond. Le tout, 1 heure avant que les premières bombes n’explosent. Le capitaine du destroyer qui vient de couler le sous marin prévient l’amirauté … qui décide que ce n’est pas grave. Peut être juste un gros dauphin en métal ?
L’autre indice provient d’un nouvel instrument : le radar. Si les Britanniques et les Allemands l’utilisent depuis plus d’un an, c’est encore quelque chose de nouveau dans l’armée US. Et comme tout ce qui est nouveau, on s’en méfie. Plusieurs stations ont été déployées dans l’archipel, depuis 5 mois. Et vers 7h, les soldats opérant le système remarquent bien quelque chose : y’a plusieurs grosses tâches en provenance du Nord. L’officier responsable alerté, celui ci déclare que non, rien de grave : une escadrille de B-17 doit arriver aujourd’hui pour se ravitailler, il s’agit sans doute eux. Les deux soldats protestent : entre une dizaine de B-17 et les grosses formations qu’ils détectent, il y a une différence. Mais on met ça sur le compte de la qualité du matériel.
Les avions japonais commencent à survoler l’île, et inévitablement, des personnes, civils comme militaires, commencent à les apercevoir ou les entendre. Mais nous sommes sur une base militaire : les entrainements sont fréquents, il s’agit forcément de manœuvres.
Et même lorsque les bombes commencent à pleuvoir, beaucoup continuent à penser à des exercices (sauf ceux bien sûr qui sont en dessous). L’alerte officielle n’est donné que cinq minutes après la première attaque, l’opérateur se sentant obligé de préciser « ce n’est pas un exercice » (« This is not a drill »).

La même base, sous le feu ennemi, depuis un avion japonais

Après coup : consternation, réelle et simulée

Comme précisé au début, je n’entrerai pas dans les détails de l’attaque (et n’insistez pas, malandrins !). Sachez juste que les dégâts sont conséquents, mais pas insurmontables à moyen terme. Or, le principal effet est psychologique : tout le monde – ou presque – est choqué. Si bien que, lorsque les premiers rapports de l’attaque arrivent au commandement américain, ceux ci restent incrédules. Même le président Roosevelt, lorsqu’il est mis au courant, s’exclame « Mon Dieu, ça ne peut pas être vrai. Il s’agit sûrement des Philippines ».

Or, la déclaration de guerre arrive bien tard … presque 10 heures après l’attaque, à cause des soucis de décodage. Si bien que, lorsque l’ambassadeur japonais arrive dans le bureau du secrétaire d’État, celui ci est bien entend déjà au courant de l’attaque, et l’accueil est pour le moins glacial. On parle clairement d’un acte de traitrise, et des propos désobligeants sur des mamans geishas furent sans doute prononcés.
L’opinion publique est tout autant surprise et choquée. Le président va jouer cette carte à fond, parlant d’infamie, de la fourberie japonaise et Cie. Et ça va marcher : les voix dissidentes, opposées à la guerre, se taisent d’elles même, et tout le pays s’engage alors dans le conflit. Peu après, l’Allemagne déclare la guerre aux États Unis, et le reste appartient à l’Histoire …

Le président Roosevelt signe la déclaration de guerre au Japon

Alors : trahison, surprise ?

L’attaque fut elle par conséquent une surprise ? Non et … oui.

Comme on l’a vu, clairement la guerre se préparait. Bien sûr, le gros de la population continuait à croire dans la neutralité protectrice et ne voulait pas entendre parler d’une guerre. Mais pour l’état major et les services de renseignements, cela ne faisait plus aucun doute : les Japonais s’y préparaient. Pour les services diplomatiques également : le peu de concessions de la part du gouvernement impérial bloquait une résolution pacifique, même si des tentatives sérieuses ont été entreprises de part et d’autre. Du coté de l’empire du Soleil Levant, l’intransigeance d’une poignée de militaires a conduit le pays dans la voie du conflit ouvert.

Attaque par traitrise ? Pas totalement : le Japon avait bien prévu de déclarer la guerre, même si c’était de justesse. Un temps de décryptage trop court conduisit à ce que le message ne soit pas remis dans les temps. Cette excuse fut exploitée à outrance pour mobiliser une opinion publique sous le choc, et cela marcha. Mais elle ne peut servir d’excuse aux pertes subies, puisque les États Unis savaient qu’ils se tramaient quelque chose.

La seule vraie « surprise » tient dans le lieu de l’attaque : du côté US, personne envisageait alors que la principale base d’opérations de la Flotte du Pacifique ne puisse être attaquée avec tant d’aisance. S’il faut saluer l’excellence de la préparation du plan d’attaque (les Japonais ayant réussi à cacher une flotte conséquente, et à la déplacer sur près de 6 000 km sans qu’elle ne soit repérée), cela ne doit pas cacher certaines impréparations du côté US. Clairement, il y a eu des erreurs, autant en amont que le jour même. On profita du côté « attaque traitresse » pour les cacher, et même si les deux amiraux en charge de la base seront relevés de leurs fonctions suite à cela. A noter également le facteur « chance », ou plutôt malchance, le télégramme d’alerte étant arrivé trop tard à Pearl Harbor.

Pourtant, le côté « surprise » s’immisça dans l’imaginaire collectif, tant les autorités américaines dissimulèrent une partie des signes avant coureur. Si bien que le sentiment anti Japon se développa très fortement, même si injustement : les citoyens américains retinrent surtout cela, alors que le Japon impérial avait bien d’autres raisons d’être détesté (comme les massacres en Chine, le traitement réservé aux prisonniers de guerre, l’utilisation d’armes bactériologiques, …).

Roosevelt était il au courant ? Une théorie du complot bidon

Dernier point : une thèse controversée commença à faire son chemin peu de temps après l’attaque. Le président et son entourage auraient été au courant de l’attaque peu avant, mais l’auraient sciemment laissée se produire (et jouant après les surpris). Il aurait même poussé le Japon à la faute, en exigeant des concessions inacceptables, et en mettant la flotte du Pacifique à portée. Son but : par une attaque de grande envergure, pousser l’opinion publique à accepter la guerre, et pouvoir ainsi intervenir dans la guerre mondiale. Et comme par hasard : le jour de l’attaque, si l’essentiel des cuirassés étaient présents, les porte avions eux, ne l’étaient pas (et en effet : les 3 portes avions US du Pacifique étaient tous absents, car en mission). Il put ainsi sauver ce qui constituerait l’ossature des « task forces », qui seraient par la suite victorieuses en Asie.

Cette théorie, bien qu’intéressante sur le coté machiavélique supposé, est complètement bidon. Une étude de plusieurs éléments permet de le comprendre.
Tout d’abord, les principaux partisans de cette théorie sont des adversaires de Roosevelt. Pour commencer, l’amiral Kimmel, le commandant de la base le jour de l’attaque et qui fut limogé par la suite. Premier promoteur de cette idée, c’était pour lui un moyen de se dédouaner. La théorie fut ensuite exploitée par les ennemis politiques de Roosevelt, et notamment les Républicains après 1945 pour accuser les Démocrates de manipulation.
D’autre part, si le président espérait bien un incident qui plongerait le pays dans le conflit, c’était plutôt avec l’Allemagne Nazie. En effet, Roosevelt s’était mis d’accord avec Churchill : la priorité serait l’Europe. Il détestait profondément Hitler, et c’était pour lui la cible à abattre. Le Japon quant à lui était inquiétant, mais on espérait encore pouvoir s’entendre avec lui. Pousser à un conflit avec le Japon nécessiterait de disperser l’effort de guerre sur deux fronts, ce qui n’était pas souhaitable (mais se produisit quand même).
En enfin, l’argument des porte avions ne tient pas plus … car à l’époque, les porte avions ne sont pas vus comme des navires aussi capitaux que les cuirassés. Ainsi, si l’US Navy avait choisi quels navires sacrifier, cela n’aurait certainement pas été ses cuirassés, mais plutôt les porte avions (et même si par la suite, on aurait pris conscience de l’inverse). Un peu comme si, en 1940, on aurait demandé à la France de choisir entre la ligne Maginot et ses divisions blindés : l’état major eut préféré se passer des blindés, alors que la ligne ne servit finalement pas à grand chose …

Si Roosevelt a utilisé à fond l’évènement pour pousser sa politique, impossible d’y voir un « complot ». Et même si la guerre paraissait inévitable, l’attaque n’est pas rendue possible par un calcul machiavélique, mais juste par quelques erreurs, un peu de malchance et une bonne gestion japonaise … Mais il est toujours plus facile de parler complots et trahisons, que de reconnaître ses propres bêtises.

Affiche de propagande US, promettant de venger Pearl Harbor

Pour aller + loin :

https://fr.wikipedia.org/wiki/Attaque_de_Pearl_Harbor

Le très bon film : Tora ! Tora ! Tora ! ; qui montre les évènements avant, la préparation, les erreurs et les coups de malchance côté US … ainsi que l’attaque. A noter que le titre du film vient du mot code « Tora », signifiant « tigre », qui était le mot code signifiant que l’attaque était une surprise totale et pouvait donc se dérouler normalement

La série de documentaires « Les grandes batailles », épisode « Le Pacifique », partie 1 (disponible sur le site de l’INA)

Le film Pearl Harbor de Michael Bay ; non sérieux, vous y avez cru ?

Sources des images : Wikipédia